Le Conseil de sécurité de l’ONU doit adopter jeudi une résolution qui a pour but de frapper les jihadistes du groupe Etat islamique (EI) au portefeuille en asséchant leurs sources de financement.Pour la première fois, ce sont les ministres des Finances des 15 pays du Conseil qui se réuniront. Une dizaine d’entre eux (Etats-Unis, France, Royaume uni, Espagne entre autres) ont confirmé leur participation, à partir de 15H00 locales (19H00 GMT). La résolution, un texte technique de 28 pages mis au point conjointement par Washington et Moscou, cible directement l’EI et s’efforce de resserrer l’étau. « Nous avons déjà de nombreux outils à notre disposition mais il faut maintenant que les pays fassent ce qu’ils ont à faire », résume un diplomate. La résolution demande aux pays « d’agir de manière énergique et décisive pour couper les fonds et autres ressources économiques » de l’EI, dont le pétrole et le trafic d’antiquités, et pour sanctionner « de manière plus active » les soutiens financiers du groupe. Les pays sont invités à faire du financement du terrorisme « un grave crime dans leurs lois nationales » et à intensifier les échanges d’informations à ce sujet, y compris entre gouvernements et secteur privé. Le Conseil avait adopté en février une première résolution permettant de sanctionner les individus ou entités qui financent l’EI en lui achetant du pétrole de contrebande ou des objets archéologiques volés en Syrie et en Irak. Un comité de l’ONU est aussi chargé depuis quinze ans de geler les avoirs financiers de tous ceux qui financent des groupes liés à Al-Qaïda. Sa liste comprend déjà 243 individus et 74 entités. Le comité sera rebaptisé « Comité des sanctions EI-Daech et Al-Qaïda ». Chaque pays est censé remettre dans un délai de quatre mois un rapport sur les mesures qu’il aura prises pour appliquer la résolution. L’ONU devra aussi produire dans les 45 jours un « rapport stratégique » sur la menace jihadiste et sur les sources de financement de l’EI. La résolution « demande à tous les pays de criminaliser pleinement le financement du terrorisme (..) même en l’absence de tout lien avec un acte terroriste précis », souligne Adam Szubin, haut responsable du Trésor américain. Quand une banque détecte une transaction suspecte, celle-ci doit pouvoir être croisée avec des données sur les déplacements de suspects ou des informations de services de renseignement, explique-t-il. Le ministre français des Finances Michel Sapin compte sur la « pression internationale » pour que tous les pays resserrent les mailles du filet. Par l’intermédiaire du Groupe d’action financière (Gafi), organisme intergouvernemental basé à Paris, rappelle M. Sapin, « chaque pays sera soumis à un examen pour savoir s’il a bien pris toutes les mesures nécessaires ». Selon des experts, l’EI engrange 80 millions de dollars de revenus par mois dans les vastes territoires sous son contrôle en Syrie et en Irak. La moitié vient de taxes prélevées sur les entreprises et les commerces et du pillage des ressources (dont les antiquités) et 40% environ de la contrebande du pétrole et du gaz. Mais les bombardements de la coalition internationale anti-jihadistes menée par les Etats-Unis et de la Russie ont réduit ces revenus pétroliers, de même que la baisse du prix du brut. Ces millions de dollars servent aussi à gérer le territoire que l’EI contrôle et à fournir à ses habitants un minimum de services. C’est le talon d’Achille de l’EI, explique M. Szubin. Le groupe « a besoin de transférer régulièrement de larges sommes pour payer les salaires, acheter des armes, maintenir les infrastructures et il doit donc accéder au système financier international », s’exposant aux contrôles. Ainsi, en Irak, le gouvernement a coupé les liens entre la banque centrale et 90 agences bancaires opérant dans les territoires tenus par l’EI.

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